Retour au blog
Sécurité des soins Amélioration des pratiques
Publié le 10 mai 2025 Modifié le 2 mai 2025
Temps de lecture : 12 minutes

Sécurité du patient au bloc opératoire : pourquoi la check-list est essentielle ?

check-list bloc opératoire

La Haute Autorité de Santé (HAS) a conçu une check-list pour renforcer la sécurité du patient au bloc opératoire. Structurée en 11 points de vigilance, elle vise à réduire les risques liés à l’intervention chirurgicale, en améliorant la coordination, la communication et la rigueur des vérifications. Comment intégrer efficacement cet outil dans la pratique quotidienne ? Quels sont ces 11 points de vigilance ? Et surtout, comment lever les freins potentiels à son adoption par les équipes soignantes ?

La version 2018 de la check-list sécurité du patient au bloc opératoire intègre la notion de Go – No Go, ultime dispositif collectif de prévention des risques avant l’acte d’anesthésie ou d’incision, levée de doutes fondamentale pour sécuriser la prise en charge des patients.

Pourquoi la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire” est-elle indispensable ?

Selon la Haute Autorité de Santé, chaque année, plus de 230 millions de chirurgies majeures sont réalisées à travers le monde. D’après les statistiques disponibles, entre 0,4 % et 0,8 % de ces interventions entraînent le décès du patient, et 3 % à 16 % sont associées à des complications.

La complexité des actes chirurgicaux entraîne des événements indésirables graves associés aux soins (EIGS), dont les principales causes sont :

  • Une prévention insuffisante des infections des plaies chirurgicales ;
  • Un environnement complexe qui fait intervenir un grand nombre de professionnels de santé ;
  • Des défauts de communication entre professionnels de santé avant, pendant et après la procédure.

Dans ce cadre, différentes mesures de contrôle visent à améliorer les soins chirurgicaux, dont la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire ».

Objectif : s’assurer qu’aucun élément obligatoire n’est oublié. L’OMS a ainsi mis en place une check-list de la sécurité chirurgicale, laquelle a été adaptée en France par la HAS. Il s’agit d’un outil mobilisable par toutes les équipes opératoires.

L’outil check-list est un détrompeur d’erreur. Il permet de structurer la vérification croisée en équipe encore appelée « cross checking » autour de temps de pause essentiels qui permettent d’identifier les situations potentiellement dangereuses avant qu’elles n’impactent le patient.

Les Never Events : les événements indésirables graves évitables

Chaque semaine, au moins un Never Event survient dans les établissements de santé en France. Bien que graves, ces incidents restent entièrement évitables et témoignent des enjeux persistants autour de la sécurité des soins.

En 2023, Relyens a recensé et traité 151 Never Events, dont 55 survenus au cours de l’année. L’oubli de compresses ou de textilomes, ainsi que l’erreur de côté, sont les incidents les plus fréquents en salle d’opération. Ces événements ne devraient jamais se produire, et pourtant, ils continuent de mettre en danger patients et professionnels.

Quelles sont les différentes versions de la check-list proposées par la HAS ?

Il existe 3 check-lists pour la sécurité du patient, élaborées avec des sociétés savantes et des organisations professionnelles. Ces listes s’adaptent à la spécificité des pratiques :

  • La check-list générique est un document adapté à toutes les chirurgies des établissements de santé
  • Les check-lists spécialisées s’adaptent aux spécificités de certaines activités interventionnelles : endoscopie bronchique, radiologie interventionnelle, cathéters veineux centraux, chimiothérapie, entre autres.
  • La check-list personnalisée permet d’adapter le document aux spécificités de l’activité à partir d’un socle de vérifications essentielles de base.

Quelles sont les 3 phases clés de la check-list “sécurité du patient au bloc opératoire” ?

La check-list proposée par la HAS compile 11 points de vigilance. Le personnel médical doit les vérifier oralement, avec la participation du patient avant son anesthésie. L’ensemble doit faire l’objet d’un traçage papier ou électronique par le « coordonnateur check-list », le plus souvent un personnel infirmier.

Lors du temps 1 de la check-list avant induction, le temps de pause sera initié par le leader médical concerné, l’anesthésiste en l’occurrence sur cette phase. La vérification croisée devra être effectuée au plus proche de l’acte d’endormissement du patient. Le coordinateur aura pour mission de poser les questions de manière exhaustive, à voix haute, et d’assurer la traçabilité en temps réel des réponses. Pour rappel, le coordinateur pose les questions mais ne doit en aucun cas y répondre.

Avant l’induction anesthésique

La “phase 1” Avant l’induction anesthésique comprend 6 points de vigilance :

1.

Le patient décline son identité. S’il ne peut pas le faire, le personnel en salle vérifie son identité en suivant la procédure d’identitovigilance mise en place dans l’établissement : bracelet, personnel accompagnant etc.

2.

Le patient confirme la nature de l’intervention et le site opératoire afin de vérifier la spécialité concernée.

3.

L’équipe vérifie que le mode d’installation du patient correspond à la nature de l’intervention et que tout le personnel la maîtrise.

4.

Le personnel soignant réalise la préparation cutanée selon les procédures en vigueur dans l’établissement. La préparation cutanée est documentée dans la fiche de liaison service/bloc opératoire.

5.

Le personnel vérifie que l’équipement et le matériel nécessaires pour l’opération s’adaptent à la taille et au poids du patient. Le matériel (instruments, appareils, dispositifs médicaux) doit être disponible et fonctionner. Le personnel d’anesthésie doit également procéder à la vérification de la sécurité anesthésique selon la réglementation en vigueur.

6.

Le personnel opératoire prend les mesures adéquates pour la prévention des risques allergiques, respiratoires et hémorragiques.

Avant l’intervention chirurgicale 

La phase 2 est dédiée au temps de pause avant l’incision et comprend 3 points de vigilance :  

7.

L’ensemble de l’équipe (chirurgiens, anesthésistes, Infirmier ou infirmière anesthésiste (IADE), infirmier ou infirmière de bloc opératoire (IBODE) procède à la « vérification ultime » des points précédents pour la deuxième fois :

  • Identifié du patient
  • Intervention prévue
  • Site opératoire
  • Installation du patient et adéquation avec l’intervention et le site opératoire

C’est aussi à cette étape que l’équipe vérifie la disponibilité en salle d’opération des documents cliniques nécessaires, tels que l’imagerie.

8.

Les équipes infirmière, anesthésique et chirurgicale partagent oralement les informations essentielles sur les points critiques :

  • L’équipe de chirurgie partage avec le reste du personnel les risques hémorragiques, traumatiques ou tout autre risque morbide. Elle précise également les étapes qui réclament des préparations ou des équipements particuliers.
  • Les anesthésistes communiquent sur les comorbidités et les traitements en cours ;
  • Le personnel infirmier confirme que le matériel dédié à l’intervention ne présente pas de problème.
9.

L’équipe vérifie que l’antibioprophylaxie a bien été effectuée selon les protocoles en vigueur dans l’établissement, si elle est recommandée. Elle confirme également la préparation du champ opératoire, toujours selon le protocole en vigueur dans l’établissement.

La check-list prévoit également qu’une décision collégiale soit prise avant l’incision afin d’acter la poursuite de l’intervention (“Go”) ou son arrêt (“No Go”).

Lors du temps 2 de la check-list avant incision, le temps de pause sera initié par le leader médical concerné, l’opérateur en l’occurrence sur cette phase. La vérification croisée devra être effectuée au plus proche de l’acte d’incision du patient. Le coordinateur aura pour mission de poser les questions de manière exhaustive, à voix haute, et d’assurer la traçabilité en temps réel des réponses. Pour rappel, le coordinateur pose les questions mais ne doit en aucun cas y répondre.

Après l’intervention chirurgicale

La phase 3 est dédiée au temps de pause à la sortie de la salle d’opération et comprend 2 points de vigilance :

10.

Toute l’équipe confirme oralement le type d’intervention réalisée, le décompte final des instruments, aiguilles et compresses et l’identification par étiquetage des prélèvements ou pièces opératoires. Elle déclare en outre tout éventuel dysfonctionnement rencontré.

11.

L’équipe chirurgicale et anesthésique rédige des prescriptions adaptées à l’âge, au poids et à la taille du patient et encadre la surveillance post-opératoire.

Point important : le coordonnateur check-list doit signer la check-list, ainsi que le chirurgien et l’anesthésiste ou l’IADE.

Lors du temps 3 de la check-list après intervention, le temps de pause sera initié par le leader médical concerné, l’opérateur en l’occurrence sur cette phase. Cette phase permet de s’assurer de la répartition des rôles entre les opérateurs et les anesthésistes sur les consignes post-opératoires.

Protégez votre activité avec la RCP médicale Relyens !

Un contrat de Responsabilité Civile Professionnelle médicale :

  • 100% adapté à votre activité (statut, spécialité, mode d’exercice)
  • Souscription rapide
  • Accompagnement par des experts
Découvrir l'offre RCP médicale
Sécurité du patient au bloc opératoire : pourquoi la check-list est essentielle ?
Sécurité du patient au bloc opératoire : pourquoi la check-list est essentielle ?

Quels sont les objectifs de la check-list au bloc opératoire ?

La check-list prévient les complications et les événements indésirables (EI) liés aux interventions chirurgicales. Elle doit notamment empêcher la survenue d’infections nosocomiales pour les patients hospitalisés, mais pas seulement.

Sa bonne application doit prévenir les principales causes d’événements indésirables en opération chirurgicale :

  • Mauvaise administration de l’antibioprophylaxie ;
  • Mise en œuvre inadéquate des protocoles et recommandations de l’établissement ;
  • Travail d’équipe inadapté ;
  • Conflits entre départements ;
  • Absence de mesures pour éviter les blessures accidentelles ;
  • Retards dans la mise en place des traitements ;
  • Exercice en dehors des domaines d’expertise ;
  • Défaut de communication des professionnels de santé avant, pendant et après la procédure.

La check-list a pour objectif de garantir que tous les éléments susceptibles de réduire le risque de complications post-opératoires soient pris en compte. Elle priorise les vérifications essentielles, favorise une communication efficace et renforce le travail d’équipe en instaurant une séquence systématique d’étapes, véritable routine de sécurité au sein du bloc opératoire.

Comment intégrer la check-list proposée par la HAS efficacement ?

Bien que la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire » soit obligatoire depuis 2010, la HAS observe des pratiques d’application encore hétérogènes.

Pour en renforcer l’usage sur le terrain, elle formule plusieurs recommandations à destination des équipes soignantes :

  • Adapter la fiche aux spécificités des pratiques de l’établissement, par exemple via le modèle de check-list personnalisée, pour qu’elle reste fidèle aux réalités de terrain ;
  • Intégrer la check-list aux pratiques du quotidien de façon systématique ;
  • L’intégrer sans discontinuité dans le flux de travail ;
  • Communiquer sur sa mise en place via des supports dédiés tels que des guides, affiches, flyers ou réunions de présentation ;
  • Impliquer la direction de l’établissement, les instances décisionnelles et représentatives et les leaders de chaque bloc opératoire dans son adoption ;
  • Encourager une réflexion collective autour de son utilisation pour améliorer l’efficacité de l’outil ;
  • Former les équipes de bloc opératoire à son utilisation ;
  • Organiser des simulations d’utilisation de la check-list pour clarifier les responsabilités de chaque équipe et répondre aux questions ;
  • Auto-évaluer son utilisation pour améliorer son efficacité.

Pour rappel, tous actes anesthésiques nécessitent un partage et vérification croisée en équipe, comme pour une anesthésie locorégionale par exemple.

Quelles sont les limites de l’application de la check-list ?

La HAS relève quatre types de difficultés qui freinent l’adoption de la check-list :

  • Méconnaissance de l’outil et besoin d’accompagnement dans son utilisation ;
  • Difficultés de mise en œuvre dues à du matériel informatique défaillant ;
  • Turn-over des équipes qui ralentit la bonne application de la procédure ;
  • Complexité de la démarche.

Le meilleur moyen de connaître le niveau d’appropriation des bonnes pratiques de réalisation de la check-list est de procéder à des audits d’observances en situation réelle.

Améliorer l’utilisation de la check-list grâce à la technologie

Les check-list papier ont fait leurs preuves, mais ralentissent parfois l’application de la procédure. Des solutions numériques permettent désormais de simplifier son application en salle d’opération :

  • Versions électroniques: elles guident le coordonnateur pas à pas, limitant les oublis liés aux erreurs humaines. Intuitives et personnalisables, elles s’adaptent à chaque spécialité chirurgicale.
  • Applications mobiles: accessibles sur smartphones ou tablettes, elles facilitent le partage d’informations en temps réel et renforcent la communication au sein de l’équipe opératoire.

De plus en plus d’établissements intègrent ces outils directement aux Dossiers Médicaux Electroniques (DME) pour centraliser les données patient et limiter les oublis lors de la rédaction du compte-rendu post-opératoire. Certaines applications proposent des alertes ou aides à la décision en cas de situation à risque.

Le « coordonnateur de la check-list » est désigné par l’établissement de santé pour s’assurer du bon déroulement de la check-list, avant, pendant et après l’intervention, en lien étroit avec l’équipe médico-soignante. Son rôle se limite à la vérification orale et à la complétion manuscrite de la check-list. Il n’est pas responsable des éventuels dommages subis par le patient au cours de l’intervention, ceux-ci relevant de la responsabilité du médecin.

Évolution de la check-list de sécurité du patient au bloc opératoire

En 2008

L’OMS propose une première check-list dans le cadre d’un programme mondial d’amélioration de la sécurité en chirurgie.

Depuis 2010

La check-list au bloc opératoire fait partie de la procédure de certification des établissements de santé.

En 2011

La HAS s’inspire de la proposition de l’OMS pour créer la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire ».

En 2016

La nouvelle version de la check-list HAS introduit des points de vigilance spécifiques à respecter lors des chirurgies pédiatriques.

En 2018

La HAS modifie une dernière fois sa check-list avec un nouvel encadré intitulé « Décision finale ». Celui-ci doit renforcer la prise de décision en équipe et aider à tracer la décision finale.

Le management des risques médicaux chez Relyens

FAQ

La check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire » 2018 est la dernière version actualisée du document proposé par la HAS.

La check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire » est obligatoire en France depuis 2010. Elle fait partie des éléments obligatoires de la procédure de certification des établissements de santé.

La mauvaise utilisation de la check-list peut entraîner la perte de certification pour les établissements de santé, ainsi que des responsabilités légales et partagées pour les médecins impliqués.

Pour renforcer l’usage de la check-list en salle d’opération, plusieurs leviers peuvent être mobilisés : encourager son adaptation aux spécificités du terrain, impliquer la direction, et valoriser ses bénéfices concrets auprès des équipes.

Les établissements de santé ont la responsabilité d’assurer la mise en œuvre de la check-list dans leurs blocs opératoires. La HAS recommande un audit à réaliser par des “observateurs extérieurs au secteur interventionnel”, selon des modalités définies par l’établissement.

Oui, la check-list s’impose pour toutes les interventions, interventions programmées et d’urgence. En urgence, cependant, la déclinaison des contrôles se fait verbalement, tout lançant l’intervention. La formalisation des réponses peut se faire dans un deuxième temps.

La check-list peut être introduite auprès des équipes de soignants via des sessions de sensibilisation et de formation, des réunions d’équipes chirurgicales, infirmières et d’anesthésistes, des affichages en bloc. La HAS fournit également des fiches pratiques, des guides d’utilisation et des vidéos explicatives.

Le coordinateur de la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire » est responsable de la coordination entre les chirurgiens, les anesthésistes et le personnel infirmier. Il s’assure que tous les critères de la check-list sont vérifiés avant, pendant et après l’intervention chirurgicale et que les informations critiques sont partagées de manière claire et concise. Il identifie les alertes et signale toute non-conformité ou problème potentiel aux responsables concernés. Il adapte également la check-list aux spécificités de l’établissement et participe à son amélioration continue.

Oui, personnaliser sa check-list fait partie des recommandations de la HAS pour favoriser son adoption par les équipes de soignants. Les check-lists personnalisées reprennent un socle d’items essentiels, qui doivent obligatoirement faire l’objet d’une vérification pour toutes les spécialités. Le contenu et la forme de la check-list s’adaptent ensuite selon les collaborations entre soignants.