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Sécurité des soins Accident de travail Relations patient
Publié le 2 août 2020 Modifié le 6 juin 2023
Auteurs
  • VHMN – user icon
    Catherine Stephan-Berthier
    Juriste direction juridique
Temps de lecture : 4 minutes

La bonne installation du patient sur la table d’opération

La bonne installation du patient sur la table d’opération est un élément primordial de la réalisation d’une intervention conforme aux règles de l’art. Le dossier du mois concerne une malposition opératoire.

Dans cette affaire, la patiente a bénéficié d’une bonne indication chirurgicale et d’un geste réalisé dans les règles de l’art. Toutefois, la mauvaise installation de la patiente sur la table d’opération a été à l’origine d’un préjudice constitutif d’une mauvaise prise en charge.

Les faits

Madame K est admise aux urgences d’un Centre Hospitalier en août 2005. Présentant des douleurs abdominales, elle bénéficie d’une appendicectomie sous cœlioscopie. Les suites opératoires sont simples d’un point de vue chirurgical. Toutefois, la patiente ressent des douleurs au bras gauche en post- opératoire.

Madame K souffre d’une parésie du membre supérieur gauche.

Souhaitant connaître l’origine de son préjudice, Madame K a saisi le tribunal et sollicité la mise en place d’opérations d’expertise.

Le rapport d’expertise

Il ressort du rapport d’expertise qu’ « un lien de causalité existe entre l’opération du mois d’août et la paralysie. La cause la plus vraisemblable est une compression du nerf radial sur le support brachial durant l’anesthésie générale ».

La décision de la juridiction

La Cour d’Appel retient la responsabilité de l’établissement. Elle relève que :

« malgré le caractère lapidaire du rapport d’expertise, il ressort que la parésie du membre supérieur gauche dont souffre Madame K est d’origine neurologique (…) dans la mesure où ce déficit fonctionnel est intervenu dans les suites immédiates de l’intervention chirurgicale alors qu’aucun antécédent d’un tel déficit n’avait été relevé, le lien de causalité entre la parésie résultant vraisemblablement d’une compression excessive du nerf radial au cours de l’opération et l’intervention pratiquée doit être regardé comme établi. Cet accident relève une faute dans le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité du CH».

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Commentaires

Cette décision appelle plusieurs commentaires :

Le positionnement du patient, avant l’induction anesthésique mais également avant l’intervention chirurgicale, fait partie des éléments à vérifier dans le cadre de la check-list du patient au bloc opératoire rédigée par la HAS.

Rappelons que les rôles et responsabilités dans l’installation du patient sont les suivantes :

  • Le chirurgien indique à l’anesthésiste son choix en matière d’installation du patient. Cette installation relève de la responsabilité de l’anesthésiste.
  • La description de l’installation du patient doit être réalisée à l’occasion de la rédaction de la fiche de bloc, laquelle fait partie intégrante du dossier médical. Cette fiche de bloc est rédigée par l’infirmier anesthésiste.

Rappelons enfin que le compte-rendu opératoire doit faire figurer tout incident survenu lors de l’intervention. Il s’agit notamment d’indiquer tout évènement en lien avec l’installation du patient et les potentielles conséquences observées ainsi que toute action entreprise pour pallier aux dysfonctionnements relevés.

En matière de malposition opératoire, la juridiction ne se borne pas à constater un préjudice en lien avec la réalisation d’une intervention mais recherche les éléments lui permettant de déterminer si les préjudices résultent d’un mauvais positionnement fautif.

Pour arriver à déterminer ce point, la juridiction se base notamment sur les indications décrites dans le dossier médical, lequel et on ne le dira jamais assez, au-delà d’être un outil de soins est un outil de preuve dans le cadre d’un contentieux.

Pour aller plus loin, ci-dessous des décisions de justice ne retenant pas de responsabilité :

Le tribunal a retenu que « les séquelles invalidantes dont souffre Monsieur B (atteinte du plexus brachial par le fait d’une compression au niveau du creux axillaire lors de l’intervention chirurgicale) sont exclusivement imputables à une compression inhérente à l’intervention chirurgicale cardiovasculaire d’une durée particulièrement longue« . Cette complication n’a été causée ni par les gestes préparatoires ni par les gestes opératoires mais constitue un des effets indésirables de ce type d’intervention.

Le tribunal a retenu « qu’il ne ressort pas de l’instruction que l’étirement du plexus brachial aurait pu être évité par l’adoption d’une autre position opératoire compatible avec le bon déroulement de l’intervention. Il n’est par ailleurs pas établi que les précautions nécessaires n’auraient pas été prises. Aucune faute ne saurait être retenue contre l’établissement tant dans l’installation de la patiente que dans la surveillance du bon déroulement de l’intervention ».

La complication relève d’un risque accidentel qui ne pouvait être maîtrisé.

En savoir plus

Si vous désirez en savoir plus sur le management des risques de la santé en établissement de santé, et en particulier sur les problématiques liés à une mauvaise tenue du dossier médical menant à une présomption de faute, ces contenus peuvent vous intéresser :

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